vendredi 2 novembre 2012

Pierre Menard - Distant Fingers - Vase Co


Vases Communicants : c'est chaque premier vendredi du mois. C'est un échange de textes, voire d'images ou de sons, entre deux sites/blogs volontaires. Idée lancée initialement par Tiers Livre  et Scriptopolis.
Les rendez-vous s’opèrent notamment grâce au groupe facebook des vases communicants, dont Brigitte Célérier est l'âme. Elle administre aussi le blog qui, mensuellement, regroupe tous les participants. (Merci à elle !). (Page précieuse pour ne manquer aucune rencontre vasèsque.)

Et c'est justement à Pierre Ménard que le tapis rouge est ce mois-ci déroulé. On aura une idée plus précise du Monsieur, en consultant la page liée à son nom sur le site Publie.net : on apprendra alors qu'outre une implication de longue date dans l'animation d'ateliers d'écriture, outre la direction de la revue numérique D'Ici Là (le n°9 arrive très vite...), ses publications s'enchaînent et retiennent plus que l'attention. À venir prochainement : Radio Ethiopia, dans la collection "Ouvrez !" de Publie.net ...dont voici, ici, un extrait en avant-première.


***


          Pour Maryse Hache, car écrire dit vivre



Distant fingers
 
All my earthly dreams are shattered,

I'm so tired I quit

Take me forever, it doesn´t matter

Deep inside of your ship



Tous mes rêves terrestres sont brisés,

Je suis si fatiguée que je m'en vais

Prenez-moi pour toujours, ça n'a pas d'importance

Profondément, à l'intérieur de votre vaisseau


Distant Fingers – 4:17


 

Dans le silence de l’attente, l’impression de reprendre ce jeu de hasard, l’espoir d’un temps désirable. Oui, là seulement est le vrai, tu es en moi depuis tout ce temps. Étrangement, il y a quelque chose de l’ordre du palimpseste. Ce serait l’archive d’un livre qui n’existe pas. Dans la conscience sans éclat de parcourir une sorte de décor vide, de trompe-l’œil, le désir chercherait en vain des prises. Ça s’est fait petit à petit, voilà tout. Même regard, seules les nuances diffèrent. Un temps — lointain, vingt ans déjà — nous avons fixé le noir qui nous séparait, nous attendions un nouvel ordre. Une nouvelle vague. Parvenir à se raconter un jour sans masque, il faut du temps. L’un près de l’autre, depuis. Appel d’air à chaque mouvement révolu, dans l’effort du désir tendu. Nous irons jusqu’au bout, ensemble. Alors c'était toi ? 

Certains persistent à confondre colère sourde et atonie, rage froide et somnolence, on ne partage rien ou si peu... L'épreuve de force est inévitable, nous sommes allés au maximum de ce que nous pouvons faire compte tenu des contraintes qui pèsent sur nous, le maximum dans la limite du raisonnable. L’épreuve de force est raisonnable, la diversité est contagieuse. Collages dont les facettes sont multipliées par le son et la radio. La diversité est contagieuse à la manière d’une nouvelle vague arasant la précédente. Archives des fragments de périodiques, journal des faits saillants de l’actualité. Laissez-moi voir le futur, la volonté de laisser un souvenir impérissable. Décrocher ce soir le sésame pour la suite. Le calme sera ramené en fin de journée. C'est toi, c'est moi. Elle a sa place à lui, lui à sa place à elle. Ce sont les mêmes scènes, mais à l'envers, de l'autre côté du miroir. Du côté où les formes sont libérées de la pesanteur et de l'inertie de ce qui doit consister pour exister sous sa forme unique. « Le monde ne se rappelle à nous que par sa disparition. Qu'est-ce que nous aurions à faire ici, nous les vivants, sinon, non de vivre, mais de mimer la résurrection ? » Rectifier le passé et le rendre capable d'en convertir l'enseignement en preuves d'amour lucides et durables. Quelle merveille de pouvoir donner ce qu'on n’a pas. Miracle de nos mains vides. 

Le présent est une perpétuelle catastrophe. Une lettre tracée sur le bleu puis effacée, un trait. Un peu de lumière et déjà c’est un visage qui vous regarde. C’est là leur grandeur et leur limite. Leur fragilité. Les choses justes ne se peuvent jamais contrarier entre elles. Sans doute nous trompons-nous d’horizon. J’aimerais maintenant faire un détour. À l’envers de la marche, je n’ai fait que chercher la place, l’endroit où écrire. Voir des oscillations dont les mouvements ne modifient que légèrement l’ordre des choses. La parole, mais aussi le geste, épousent l’architecture. La réciproque est aussi vraie. Comment perdre ? c’est la question. Pour mieux comprendre, pour se perdre dans une nouvelle vague. La vivacité, de celle qui s’épuise au moment même où elle s’énonce, et non du bonheur perdu. Visage aimé, visage bien connu de nous surpris dans la foule, dans le va-et-vient de la rue. On dirait que ces détails sont mal synchronisés. Mais non. Il est tôt, je pars marcher. Il faut d’abord suivre un chemin et c’est toi qui m’accompagnes. 

Pierre Ménard

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